Cinq questions à Alice Clerc

Alice Clerc a été choisie en 2019 pour coordonner le projet de coopérative (et rédiger les statuts) pour l’ouverture d’un supermarché participatif à Nancy. Premières impressions, vision du projet, rôle précis dans l’association : la coordinatrice de la Grande Epicerie Générale se prête à la question.

  1. Pourquoi une salariée dans un supermarché participatif ?
    L’objectif n’est pas de remplacer le travail qui est aujourd’hui mené par les adhérents bénévoles mais de mettre en oeuvre la suite du projet, notamment la constitution de la coopérative.
      
  2. Qu’est-ce qui vous amène à Nancy ?
    Je travaillais avant à l’association des agriculteurs biologiques en Ile-de-France. Je suis venue rejoindre mon compagnon qui vivait déjà à Nancy.
      
  3. Quel est le rôle d’une coordinatrice ?
    Dans un premier temps, mon rôle est de mener le projet de création de la coopérative pour passer de l’épicerie-test actuelle de la rue Saint-Nicolas, à un supermarché sur une plus grande surface avec plus de références et des horaires d’ouverture étendus. Je suis particulièrement impliquée dans la concertation pour la rédaction des futurs statuts, dans la construction de la trame financière de la coopérative, dans le recrutement des futurs sociétaires, dans la recherche des futurs locaux et dans leur aménagement.  

    Ne pas aller trop vite 
    pour un projet solide

    Toutes les étapes du projet sont préparées avec les bénévoles impliqués dans les groupes de travail concernés puis validées en concertation avec l’ensemble des adhérents, notamment lors du forum ouvert sur les statuts de la future coopérative début avril et lors la prochaine assemblée générale le 16 mai 2019.

    En parallèle, j’appuie également un peu au fonctionnement opérationnel de l’épicerie test et pour le moment je m’attache au rapprochement des factures fournisseurs et au suivi des commandes.

  4. Quelle sont vos premières impressions après plusieurs semaines dans les locaux du 61, rue Saint-Nicolas ?
    Fraiches à mon arrivée en janvier ! Au delà de la fraîche température du local – ça va mieux maintenant – je suis agréablement surprise de voir le niveau d’implication de certains bénévoles qui sont très moteurs dans le projet. C’est une formidable aventure humaine, même si ça peut parfois générer des petites tensions, il n’est pas si fréquent qu’il y ait autant de bénévoles motivés autour d’un même objectif ! C’est une véritable force pour le projet. Je suis arrivée seulement 9 mois après l’ouverture de l’épicerie-test, il y avait déjà près de 700 produits référencés et 400 adhérents, c’est une vraie réussite.
  5. Le projet de supermarché participatif vous semble-t-il réalisable dans une ville moyenne comme Nancy ?
    C’est toujours difficile à prévoir à l’avance… Pour moi la réussite d’un tel projet ne dépend pas de la taille de la ville, mais plutôt du nombre de personnes qui s’impliquent dans le projet. Le plus important, c’est que chaque membre s’approprie le projet, comprenne que c’est notre projet à tous et qu’on en est tous responsables.     Si chacun s’engage à minima à faire ses services et ses courses à la Grande Epicerie Générale, il y a de très grandes chances que le projet réussisse !
POUR EN SAVOIR PLUS

Connaissiez-vous Nancy et le Grand-Est avant de venir ?
Je connaissais déjà l’Alsace puisque j’y ai travaillé quelques mois juste après la fin de mes études. En revanche, je n’étais venue que quelques fois à Nancy, principalement le week-end.

Comme dans tous les projets, certains trouvent que le passage de « l’épicerie-test » au supermarché n’est pas assez rapide. Qu’en pensez-vous ?
Dans la réussite d’un projet, il y a généralement trois facteurs stratégiques : la qualité, le délai et la dépense financière. Si on veut maintenir le niveau d’exigence de notre projet et limiter les dépenses financières ça demande nécessairement du temps. Il est important de ne pas aller trop vite pour que le projet soit solide et reste collaboratif, pour correspondre aux attentes des adhérents…

Maintenant que « l’épicerie-test » a fait ses preuves, nous pouvons envisager de passer au statut coopératif et déménager dans des locaux plus grands afin de poursuivre l’augmentation du nombre de références.

Vous commencez votre CDI par un stage de six mois, c’est bien ça ?
Pour l’instant, je suis en stage de formation professionnelle à la Grande Epicerie générale jusqu’au 7 juillet 2019. Mon stage s’inscrit dans le cadre du dispositif ARDAN co-financé par la Région Grand-Est : j’ai un statut de demandeuse d’emploi, stagiaire à la Grande Epicerie Générale, tout en bénéficiant de sept formations de deux jours assurées par le CNAM.

Je ne serai embauchée en CDI que si le projet de création de la coopérative aboutit et que les moyens financiers sont suffisants pour me rémunérer.

Le vrac peut-il davantage se développer dans « l’épicerie-test » ?
Le vrac peut bien-sûr se développer dans « l’épicerie-test », d’autant qu’il semble s’agir d’une demande de nombreux adhérents. Le groupe de travail «zéro déchet» est en train de demander des devis à plusieurs entreprises pour l’achat de silos, afin que nous puissions estimer le coût nécessaire et trouver le financement.

La taille de l’espace de vente deviendra rapidement un facteur limitant pour le vrac comme pour le reste, c’est pour cette raison que le groupe de travail «immobilier» est en recherche active d’un nouveau local plus vaste. En attendant, nous devons construire avec les contraintes…

Connaissez-vous les autres projets de supermarchés participatifs en France ?
J’étais moi-même adhérente d’un magasin participatif à Paris qui s’appelle Coop à Paris. Il regroupe 400 adhérents et la surface de vente est comparable à la surface de vente actuelle de la Grande Epicerie Générale, avec notamment un rayon vracet une vitrine réfrigérée de fromages vendus à la découpe… Ce projet n’a cependant pas vocation à s’agrandir pour devenir un supermarché, contrairement à La Louve, dont j’ai eu l’occasion d’aller visiter ses 1450 m2.

Plus récemment, j’ai également visité le magasin participatif de Colmar, les Oies sauvages, lors de la 1ère réunion intercoop Grand-Est, un moment riche en échanges et en partages entre toutes les initiatives du Grand-Est.

Quels sont vos horaires ?
Je travaille généralement au local du lundi au vendredi de 9h30 à 18h15. Participant cependant à nombreuses réunions en soirée (une à deux par semaine), il arrive que je ne sois pas là dans la journée pour récupérer.

N’hésitez pas à me contacter si besoin par Basecamp ou sur mon mail qui a été communiqué à tous les adhérents.

Pensez-vous que la tendance vers une consommation plus active et plus choisie soit un mouvement sur le long terme ?
De mon point de vue, ce que recherchent de plus en plus les consommateurs c’est la transparence et la confiance. Que ce soit en terme d’origines des produits, de conditions de productions ou de constructions des prix, le système actuel construit par l’industrie agro-alimentaire et la grande distribution est d’une telle opacité qu’il mène aujourd’hui à une certaine méfiance, voir à des scandales sanitaires sans précédents.

Je pense que la tendance vers une réappropriation de notre consommation ne fait que commencer et sera donc de plus en plus importante.

 Merci Alice Clerc et bienvenue à Nancy !

Alice, coordinatrice de la Grande Epicerie Générale à Nancy. Supermarché participatif.

Photographies : Alice Meyer / Grande Epicerie Générale à Nancy.